Bedous – Urdos

Le Puy-en-Velay - Santiago de Compostela 2009

“Pluie du matin n’arrête pas le pèlerin“. Eh bien c’est vrai, je l’ai vérifié aujourd’hui. D’abord un crachin béarnais qui me rafraîchit jusqu’à l’auberge d’Estanguet. Puis, comme la pluie devient insistante, je finis par sortir mon poncho. En général, c’est quand vous avez enfin réussi à l’enfiler, qu’il couvre bien votre sac à dos (pas facile quand il y a du vent), que l’averse cesse.
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Pour une fois, il n’en est rien, et c’est au moment de me remettre en route que je remarque la présence d’un jeune chien, plutôt craintif (non, pas Pluto). Pour le rassurer, je l’appelle et le caresse, belle connerie, il se glisse dans mes pas. À l’arrivée sur la RN134, j’ai beau gueuler, le menacer de mes bâtons, rien n’y fait, il choisit de me suivre.

Alors que le Chemin longe une voie parcourue par de nombreux semi-remorques, qu’il pleut, que la chaussée est glissante, je dois veiller à ma sécurité et à celle de ce corniaud. Cet abruti se plante au milieu de la route pour courir ensuite après les autos comme s’il s’agissait de brebis. Affolés, tous freinent en le voyant et m’engueulent en pensant que je suis son propriétaire.
Plusieurs fois des poids lourds s’arrêtent, derrière les voitures pilent. On frôle le carambolage. Et moi, au milieu, vociférant après le pot de colle.

Enfin, juste avant Cette-Eygun, je m’engage dans un sentier qui m’éloigne du goudron. Une barrière métallique en règle l’accès. Je la referme derrière moi pour me retrouver, enfin, seul. Le corniaud m’observe, je m’éloigne, il semble s’être résigné. Je longe le gave en traversant une prairie d’herbes hautes maculée de fleurs des champs. Je me retourne machinalement, mon meilleur ami est sur mes talons.
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Rebelote, jet de bâtons, vociférations, rien n’y fait. Heureusement, se présente une nouvelle barrière métallique. Elle semble plus difficile à franchir par un chien, même obstiné. Divorce consommé, j’arrive en vue d’une passerelle de bois qui doit me permettre de franchir le Gave pour retrouver la nationale et filer vers Borce.
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À 12h15, France Bleu Béarn doit m’appeler pour une interview en direct. Il est 11h30, j’accélère le pas. Il pleut toujours, je n’ai que 500 mètres à faire avant de bifurquer vers Borce, je tourne la tête, Uhu a retrouvé ma trace. Comment faire pour qu’il me lâche ? Je repense au capitaine Haddock et à son bout de sparadrap (*pour les tintinophiles).
Deux semi-remorques espagnols dévalent en convoi, tous feux allumés. Et l’autre s’aplatit au milieu de la route comme devant un troupeau. Le premier conducteur fait un écart en donnant de la trompe. Je n’ai pas vu ce qu’a fait le second. J’ai préféré tourner la tête et fermer les yeux pour ne pas assister au massacre.
Je ne sais pas comment, mais ce dingo s’en est encore sorti.
À l’entrée de Borce, un chantier de travaux publics me permet de faire diversion. J’explique mon problème. Un ouvrier me propose de fixer son attention le temps que je m’éloigne. En fait, comme Haddock, je me suis débarrassé de mon bout de sparadrap en le repassant à une âme compatissante (*pour les mêmes).

J’arrive, rincé, au café communal où Eliane m’accueille avec beaucoup de générosité. Une fois l’émission terminée, je n’ai plus qu’à franchir prudemment le défilé du fort du Portalet pour finir l’étape.

Demain, ascension du Somport, les bulletins météo prévoient de la neige à 1200m, encore une belle journée d’aventures en perspective. Il ne me manquerait plus que la compagnie d’un ours pour me motiver dans l’effort.

Vendredi, 15 mai 2009, trentième étape.
Urdos – Somport – Canfranc Estacion
18,5km, 5h00 de marche.


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